Anne-Marie Haurez

Anne-Marie Haurez a 93 ans. Originaire de Franche-Comté, elle a longtemps vécu en région parisienne et habite aujourd’hui dans la Drôme où elle passe sa retraite.

« Mon totem, c’est Châtaigne. Ce sont les cheftaines qui l’ont choisi lors de mon premier camp en 1941. C’était pendant la guerre. J’habitais Belfort en zone occupée, les mouvements scouts étaient interdits.

On faisait quand même du scoutisme mais, pour « tromper l’ennemi », on se faisait appeler les JELM (Jeunesse Évangélique Luthérienne du Pays de Montbéliard) : on passait ainsi pour un patronage ! »

En 1942, Anne-Marie perd son père, elle a 14 ans. Le scoutisme lui permet alors de trouver un centre d’intérêt en dehors de sa famille et de ses camarades de classe.

Au sein des éclaireuses, Anne-Marie aime le fait d’être ensemble, de participer à des activités : faire des jeux, chanter, réaliser des « performances » comme apprendre à faire tous les nœuds.

« Le scoutisme m’a appris à me débrouiller, à prendre des initiatives, à avoir des responsabilités.

Il fallait aussi faire sa B.A. (Bonne Action). Les activités étaient très liées à la paroisse puisque c’était notre couverture vis-à-vis des autorités. On ne pouvait pas faire le lever des couleurs, c’était clandestin ! C’était du scoutisme sans les possibilités qu’on aurait pu avoir si on n’avait pas été occupés.

Je me souviens qu’un été, juste à la fin de la guerre, on devait camper avec une compagnie d’éclaireuses de Strasbourg. On a pris le train jusqu’en Alsace, on s’est installé. On attendait l’arrivée des éclaireuses alsaciennes, mais elles ne sont jamais arrivées. En effet, elles avaient été informées avant nous qu’on n’avait pas le droit de camper car le terrain était peut-être miné ! Nous sommes donc rentrées, le camp a été annulé.

Pendant la guerre il y avait au sein de notre groupe des éclaireuses protestantes, catholiques et des neutres.

A la fin de la guerre, il y a eu une séparation, les éclaireuses qui n’étaient pas d’origine protestante sont devenues des éclaireuses neutres. »

Après avoir été éclaireuse, et après avoir suivi un camp de formation, Anne-Marie est devenue cheftaine.

« Le scoutisme ça donne une certaine idée d’appréhender la vie, il faut prendre ses responsabilités et se débrouiller tout seul, mais il faut aussi fonctionner ensemble car on peut alors faire des choses à plus grande échelle. Le scoutisme m’a appris à me débrouiller seule et à ne pas dépendre des autres, mais il m’a aussi appris à faire des choses en commun avec d’autres, et à faire attention à son prochain. En cela, le scoutisme a été formateur. »

Par le biais du scoutisme, Anne-Marie rencontre son mari, éclaireur lui aussi. Ensemble ils ont trois filles qui participent à leur tour aux activités scoutes et deviennent toutes les trois cheftaines à leur tour. Ils s’investissent alors avec deux autres couples dans un groupe d’anciens éclaireurs rencontrés dans une paroisse protestante de la région parisienne.

« Nous formions un conseil qui se mettait au service des nouveaux responsables. Avec mon mari, nous nous sommes aussi engagés dans l’église, j’ai été monitrice de l’école du dimanche et ensuite catéchète. »

Anne-Marie termine en disant : « Le scoutisme m’a donné une règle de vie que j’ai essayé de suivre le mieux possible tout au long de ma vie. »

Propos recueillis par Anne Sautter, Crépol, mai 2021.