Andrée Viénot,
anticolonialiste, sous-secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports

Andrée Viénot, domaine public via Wikipedia

Andrée Viénot est née au Luxembourg, mais c’est en France qu’elle réalise la plupart de ses engagements. Issue d’une famille de riches industriels, diplômée de la London School of Economics, c’est avec son mari Pierre Viénot – qui sera dans le gouvernement du Front populaire – que débute ses engagements en politique. Fait notable, c’est elle qui adhère à la SFIO (ancètre du Parti socialiste) avant lui et l’y entraine. Ensemble, ils sont ensuite résistants. Son mari meurt pendant la guerre : elle continue seule, contribue à la reconstruction clandestine du Parti socialiste, et à la Libération, est désignée députée à l’assemblée constituante de 1946. Juste après, elle devient sous-secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports : c’est elle qui fusionne les services de ces deux domaines et crée la première … inspection générale de la jeunesse et des sports! Elle défend le développement des colonies de vacances et des équipements sportifs, et tente (mais sans succès) d’obtenir la suppression des subventions publiqes aux associations éducatives confessionnelles ou politiques (y compris celles auxquelles elle a pu appartenir). Elle met fin à ses engagements de députée pour des raisons familiales (elle est seule pour élever ses deux enfants), mais continue d’agir vigoureusement dans le contexte de la guerre d’Algérie : elle défend l’indépendance, critique la politique de guerre à outrance du gouvernement et démission de la SFIO pour cette raison. Elle intègre le comité central de la Ligue des Droits de l’Homme en 1958, et contribue à y faire vivre une approche anticolonialiste qui y est alors minoritaire. Elle est aussi pendant plusieurs années maire de sa commune, et élue départementale. Vous pouvez en savoir plus sur sa page Wikipedia, récemment enrichie.


Dire qu’on a failli passer à côté d’elle! En réalité, on l’avait repérée depuis un moment via sa notice dans le Maitron, qui mentionne qu’elle a fait du scoutisme mais … au Luxembourg (dans un groupe nommé « les campeuses bronzées de Dudelange »!). Elle ne rentrait donc pas dans les critères des Astrales… jusqu’à ce que nos recherches récentes sur d’autres femmes ayant pris position contre la guerre en Algérie nous ramènent à son nom… En fouillant un peu plus, on découvre qu’une fois installée dans les Ardennes, avec son mari, elle s’engage aussi à la FFE-neutre, dont elle sera commissaire locale. Nous voilà donc sur ses traces 🙂

Extrait de « Le Chef » decembre 1946 – via N. Palluau / A. Bordessoulles – scan Réseau Baden Powell

Pour découvrir un peu plus ses engagements, vous pouvez lire ici ses arguments, à l’Assemblée nationale en 1946, pour réserver les subventions éducatives aux associations laïques liées à l’école publique; ou ici, un article écrit en 1961 pour la Ligue des Droits de l’Homme au sujet de la situation des « Français d’Algérie » (Pieds-Noirs) dans le contexte de la guerre d’Algérie. Elle y défend l’importance d’organiser leur retour en France avec « solidarité« , tout en estimant que « le grand obstacle à la Paix en Algérie, depuis six ans, réside dans le fait que l’Algérie a été une colonie de peuplement et qu’un million de Français y vivent, s’accrochant à leurs privilèges avec une absurdité furieuse (…) il ne saurait être question pour nous, ligueurs, de sacrifier la Paix, la jeunesse française et les droits de près de 9 millions d’Algériens musulmans, aux privilèges et aux droits acquis d’un million d’Européens. (…) Leur comportement politique absurde et souvent atroce est un comportement de classe. Ils se sont conduits en classe dominante. Pourquoi ? Parce que depuis 130 ans, la France les a installés là-bas en dominateurs »

Maud

Isaure Luzet, pharmacienne et résistante

Isaure Luzet débute le scoutisme enfant au sein d’une section neutre de la FFE. Elle sera par la suite cheftaine au sein de la section Paris-Luxembourg puis s’engagera comme cadre.

En 1920, elle devient l’une des premières femmes pharmaciennes de France. Installée à Grenoble, elle participe, durant la seconde guerre mondiale, à un réseau de résistance lié au couvent de notre dame de Sion, en face de sa pharmacie. Elle contribue à ce réseau en convoyant des enfants juifs et en leur fournissant de faux papiers. Son appartement personnel permet aux sœurs du couvent de mettre à l’abri les fugitifs lorsqu’une visite des allemands est annoncée ou que le couvent est surveillé. Son uniforme d’éclaireuse lui permet de passer inaperçu lors de ses missions.

Elle collabore aussi avec Liliane Klein-Lieber, membre de la sixième (groupe de résistants juifs au sein des Éclaireurs Israélites). Elle est aussi membre du réseau de parachutage Mathilda des forces françaises combattantes (FFC) et du réseau Périclès.

Après la guerre Isaure Luzet est élue conseillère municipale. Durant la même période, elle est impliquée dans l’affaire Finaly.

Elle est nommée Juste parmi les nations en 1988.

Pour lire sa fiche wikipédia, c’est par ici.

Adelaïde Hautval,
médecin et résistante

Cette éclaireuse alsacienne (1906-1988), fille de pasteur, a défendu pendant toute sa vie les droits humains.

C’est une femme d’une très grande force de caractère, capable de défendre une famille juive malmenée par la police allemande pendant la Seconde guerre mondiale. Elle refuse de participer aux expériences abominables des médecins nazis dans les camps de la mort. Elle sauve de nombreuses femmes ou les aide à soulager leur souffrance dans ces camps.

Son père s’appelait Philippe Haas et était pasteur réformé ; sa mère s’appelait Sophie Kuntz. C’est la dernière de sept enfants.

Dans un entretien accordé en 1972 à un journaliste de la BBC, Adelaïde Hautval surnommée Haïdi a révélé que son père portait un intérêt particulier à la question juive. Il décrivait les Juifs comme le « Peuple du Livre », se sentait plus proche d’eux que de ses voisins catholiques et voyait également une grande analogie entre la tristesse du peuple hébreu en exil et celle d’une famille alsacienne privée de sa terre natale qu’était la France avant la guerre franco-prussienne. Elle ajoute : « Cette révérence envers les Juifs ne m’a jamais quittée. Je ne peux pas oublier qu’ils ont souffert plus qu’aucun autre peuple dans l’histoire ». C’est ce qui peut expliquer son attitude envers les juifs.

Cheftaine de la Fédération française des Éclaireuses

Scolarisée à Guebwiller, elle veut devenir médecin après avoir été soignée d’une blessure à la jambe. Ado, elle est cheftaine chez les éclaireuses protestantes de Guebwiller, au sein de la Fédération française des Eclaireuses. Après son bac, elle étudie la médecine, avec une spécialité en psychiatrie. Son père voulait changer de nom après la 1ère guerre mondiale et l’a francisé de Haas en Hautval, ce que Adelaïde fera reconnaître officiellement après la 2e guerre mondiale. Elle fonde avec son frère un institut pour enfants en difficulté et part suivre des études en Suisse en 1939. La population alsacienne est évacuée vers le Sud-Ouest. Adélaïde part à Limoges, puis à Vauclaire en Dordogne. Elle commence à travailler à Lannemazan en 1941. En 1942, elle essaye de se rendre en Alsace pour le décès de sa mère, mais reste coincée à Belfort. Pour rentrer à Lannemazan, elle envoie une valise lourde à Limoges chez une de ses amies qui est commissaire de la Fédération française des Eclaireuses. La valise se perd, Adelaïde doit retourner à Vierzon pour la chercher, en juin 1942. Elle franchit la ligne de démarcation sans laisser-passer, elle est arrêtée et transférée à Bourges. Comme elle défend une famille juive maltraitée par les soldats allemands et se confectionne une étoile jaune en papier, le SS lui dit : « Puisque vous les défendez, vous partagerez leur sort ». Elle se retrouve à porter l’étoile et un bandeau « amie des juifs ».

Envoyée dans les camps du Loiret, elle assiste à l’arrivée des juifs, arrêtés et enfermés au Vel d’Hiv. Elle vit aussi la séparation des enfants et de leurs parents. Malgré les tentatives de sa sœur et de son directeur d’hôpital, Haïdi est envoyée à la prison Orléans, puis au fort de Romainville en novembre 1942 et au camp de Compiègne. Elle réussit à écrire à sa sœur et jette des lettres du convoi en route la Pologne. Elle arrive à Auschwitz le 17 janvier 1943 et y reste jusqu’au 2 aout 1944.

Comme elle est médecin et parle allemand, elle est envoyée au block 22, à l’infirmerie, appelée le Revier. En mars 1943, le médecin chef Wirths lui demande de participer à des expériences gynécologiques, elle refuse de poursuivre quand elle se rend compte de ce qu’ils font. Un autre médecin tente de lui faire faire des anesthésies mais après la première et seule opération à laquelle elle a participé, elle refuse de poursuivre ces expériences de stérilisations au rayon X. « J’en souffre encore d’avoir fait la 1ère opération » répondra-t-elle à un journaliste qui l’interroge sur cette première opération. « C’est contraire à mes convictions », dira-t-elle à Wirths pour ne plus en faire. Au terrible docteur Mengele qui lui demande de l’assister dans ces expériences sur les jumeaux, elle répond : « Cet ordre est-il définitif ? ». « Je ne peux pas la forcer à ce qu’elle ne veut pas faire », aurait-il dit à son entourage pour expliquer le refus d’Adelaïde à sa proposition qu’elle a déclinée.

Elle tenait tête aux nazis

Pour Georges Hautpmann, le médecin qui a écrit sa biographie, le fait qu’elle ait échappée à la mort alors qu’elle a tenu tête aux nazis est assez étonnant. « Il y a un aspect mystérieux. Je pense qu’elle avait pris un réel ascendant sur les médecins », dit Georges Hautpmann. Elle parle des nazis en ces termes : « Ce sont des faibles qui cherchent à dissimuler leur faiblesse sous des rêves de compensation. Et si on leur tient tête un peu, ils sont sans réaction et sont démontés. » Les médecins étaient précieux pour les nazis, ils ont mieux survécus que les autres prisonniers, fait remarquer un observateur lors d’une conférence sur Haïdi. Une autre explication vient du fait qu’elle était « aryenne » pour les nazis et non juive. Ils pouvaient donc avoir pour elle une forme de respect.

Entre novembre 1943 et mars 1944, Adelaïde est malade du typhus mais survit. En août 1944, elle est transférée à Ravensbrück, au camp de Neuengamme. « De nous deux, le vainqueur ce n’est pas vous », a-t-elle dit au chef du camp. Renvoyée à Ravensbrück en septembre 1944. Elle soigne, épargne les femmes, les reçoit à l’infirmerie pour qu’elles se reposent, demande à ce qu’on leur mette un peu de rose sur les joues pour qu’elles aient l’air moins malades et évitent ainsi la chambre à gaz. Elle se lie d’amitié avec une détenue hollandaise, Aat Breur, qui réalise des portraits d’Haïdi. Elles resteront amies même au delà de la guerre. À la libération du camp, le 30 avril 1945, Adelaïde joue la Marseillaise sur le piano trouvée dans une maison d’un des dignitaires nazis.

Engagée contre la torture en Algérie

Elle reste pour soigner les femmes intransportables, avec Marie-Claude Vaillant-Couturier, Aat Breur et Geneviève Leider. Elle reçoit la Médaille de la reconnaissance française. En 1946, elle rédige ses souvenirs, qui seront édités bien plus tard…en 1988, puis réédités en 2006. Elle travaille au service hygiène scolaire et habite à Groslay (Val d’Oise) dans une maison qu’elle partage avec une amie connue à Strasbourg. Elle est organiste au Foyer de Grenelle à Paris. Elle dénonce la torture en Algérie et la répression d’une manifestation d’Algériens.

En 1964, elle est citée comme témoin au procès intenté par Wladyslaw Dering, un chirurgien polonais, collaborateur des médecins nazis. Il avait réussi à échapper à la justice et à s’installer à Londres. Wladyslaw Dering a porté plainte en 1962 contre l’écrivain américain Léon Uris, auteur du roman Exodus car il estimait qu’un passage du roman lui causait un grave préjudice et ruinait sa réputation. Il demandait des excuses et des dommages-intérêts. Adelaïde Hautval a témoigné pour dire que c’était possible de s’opposer aux nazis, ce que Dering prétendait impossible.

Léon Uris est à l’origine de la reconnaissance d’Adelaïde Hautval. En 1965, elle est nommée Justes parmi les nations, titre de reconnaissance de celles et ceux qui ont aidé et sauvé des juifs pendant la guerre. Adelaïde Hautval justifie son comportement et dit son refus de la lâcheté : « les événements terribles débutent par de simples gestes de lâcheté ».

Le juge Moshe Bejski, président de la commission des Justes de Yad Vashem dit d’elle qu’elle est « une des plus remarquables personnes que l’humanité a connue ».

Une école porte son nom dans son village d’origine

Le 12 octobre 1988, elle met fin à ses jours après avoir accompagné son amie jusqu’à la mort.

Un hôpital porte son nom à Villiers-le-Bel (Val d’Oise), une rue à Blaye (Gironde), une école à Guebwiller vient d’être inaugurée en 2019. Une exposition réalisée par l’Union des Eglises protestantes d’Alsace et de Lorraine est présentée dans plusieurs lieux. Une bien maigre reconnaissance pour cette femme de convictions.

Laure Salamon

(avec l’aide du livre Rester humain ! : Leçons d’Auschwitz et de Ravensbrück (Buigraphie d’Adelaïde Hautval), éditions Ampelos, 2018, 10€.

Elle fait partie des douze femmes présentées dans le calendrier des EEUdF en 2021.

Pour lire sa fiche wikipedia, c’est par ici.

Liliane Klein-Lieber
résistante et militante associative

Liliane en 1942
Mémorial de la Shoah, collection Liliane Klein-Lieber

Liliane Klein-Lieber (1924-2020) est résistante, militante associative et membre des Éclaireurs Israélites de France .

Pendant la seconde guerre mondiale, alors qu’elle est contrainte de quitter successivement Strasbourg puis Vichy, elle est recrutée par le réseau clandestin La Sixième fondé par des membres des Éclaireurs Israélites de France.

Liliane Klein-Lieber décrit dans cette vidéo les actions du réseau clandestin de La Sixième

Au sein de ce réseau, elle aide à mettre en sécurité des enfants et jeunes juifs dans la région de Grenoble sous son nom de résistante : Lyne Leclerc. Elle cherche des planques, des vêtements, des cartes de ravitaillement, … et veille à leur apporter de l’affection et des repères.

Carte d’identité de résistante de Liliane Klein-Lieber

Après la guerre,  elle continue à s’engager pour les autres en militant dans différentes associations.

Elle participe notamment à la création de la Coopération féminine avec trois anciennes éclaireuses israélites qui sera à l’origine de la création du premier Centre d’aide par le Travail pour handicapés mentaux légers en 1991. Elle participe également à la création du Centre national du volontariat et de l’association des Enfants cachés. En parallèle elle est membre active des Anciens de la Résistance Juive en France et effectue de nombreux témoignages sur la Shoah et la Résistance. Elle continue également à suivre les éclaireuses et éclaireurs israélites de France.

Jusqu’à la fin de sa vie, elle a conservé des liens étroits avec certains des enfants qu’elle a caché.

Plusieurs de ces témoignages sont disponibles en ligne en vidéo, dont celui ci-dessous publié par les EIF en 2014.

Liliane Klein-Lieber témoigne de son parcours de résistante et de jeune juive pendant la seconde guerre mondiale

Sa page Wikipédia est à jour ! On cherche à contacter sa famille pour y ajouter une image libre de droit.

Anne Wahl
résistante et Juste parmi les Nations

photo de Anne Wahl
Anne Wahl (archives familiales)

Éclaireuse FFÉ-neutre, Anne Wahl (née Olkowsky) quitte, à 16 ans, en vélo, la Lorraine envahie. Une ‘explo’, un exploit?! Devenue infirmière, elle travaille au sanatorium de Prélenfrey (38) où elle protège des enfants juifs, malades ou pas. Elle organise les plus grands en équipes scoutes. Là, à la croisée de chemins de résistance, elle trouve des Éclaireurs, auxquels elle se lie et rend « des services ». Par son sang froid elle sauve les hommes du village suspectés d’être maquisards. La guerre finie : sa famille, l’information sexuelle scolaire, le transport scolaire, les activités associatives pour la population, son métier puis la collaboration à l’entreprise de son époux, sont ses engagements. Médaillée pour la résistance, elle est aussi reconnue Juste parmi les Nations.

Comment ai-je découvert son parcours ?

Correspondante régionale PACA de l’Association des Anciens Éclaireurs et Eclaireuses, j’ai été en contact avec de nombreuses personnes, qui racontaient… J’ai commencé un recueil de témoignages, car ces paroles, ces écrits, ces photos, ne pouvaient pas être que pour moi et je me suis rapprochée de l’Association pour l’Histoire du Scoutisme Laïque. Matka, une ancienne éclaireuse de Marseille, m’a parlé de son clan EDF avant et pendant la guerre. Nicole Clarence en a fait partie. Matka est encore en contact amical avec ceux qui restent… Toute leur vie, ce qu’ils avaient vécu, même de loin, les soudait. Elle m’a offert le livre de Bernard Delaunay, frère d’Anne, que j’avais rencontré à la Journée de la mémoire AHSL-EEDF (2013) sur l’engagement en résistance, le sien. Je n’ai pas lâché la piste … j’aime les personnes rencontrées, dont Mme Wahl.

En elle, j’ai trouvé une FFÉ : simple, intelligente, sereine et se connaissant bien, ouverte aux autres, engagée par l’action quand un problème collectif à résoudre se présentait, sans vouloir être élue locale. D’où mon envie de la faire connaître dans notre mouvement,
comme exemple de mise en pratique de ses valeurs. Le centenaire FFE est un bel écrin pour cela et pour la faire connaître à l’extérieur de nos sphères. De son ouvrage réservé à sa famille, elle dit : « Le désir d’écrire est celui de fixer pour se souvenir et mieux juger ».
Ce « mieux juger», à 90 ans, dit toute la qualité de la personne, qui en se remettant encore en cause, aide à réfléchir.

Vous pouvez lire une fiche plus détaillée, où elle témoigne notamment de ses actions durant la guerre, et qui présente davantage d’informations sur ses engagements ultérieurs.

Nelly

Jacqueline Fleury-Marié
résistante, déportée et survivante

Jacqueline Fleury-Marié
Couverture du livre Résistante

Samedi 12 décembre 2020, Jacqueline Fleury-Marié soufflait ses 97 bougies.

J’avais lu son livre de témoignage et je prévoyais d’aller la rencontrer. Mais vu la situation sanitaire, impossible d’aller à Versailles.

Son anniversaire offre l’occasion de se pencher sur son livre. Un bien beau témoignage. Une page m’intrigue. Elle raconte dans la prison de Fresnes comment elle communiquait avec une autre détenue en tapant des messages en morse sur les tuyaux. Elle l’a appris chez les scouts, évidemment. Elle le dit page 68. Il se trouve que la détenue qu’elle soutient est une femme que je connais un peu, Marie Médard-Fillet. Un livre sort d’ailleurs bientôt sur elle, on en reparlera !

Me voilà décrochant mon téléphone pour appeler Jacqueline Fleury-Marié pour lui souhaiter son anniversaire. Elle m’accueille gentiment au téléphone, même si elle a été visiblement interrompue dans une réunion amicale ou familiale. Il y a du monde autour d’elle.

Elle me confirme donc qu’elle a passé quelques années chez les Guides de France à Poitiers où son père avait été nommé après plusieurs années à Strasbourg et avant d’arriver à Versailles en 1939. « Le reste, vous l’avez dans le livre ! » me suggère-t-elle.

Je sais bien, je l’ai lu. Et d’ailleurs je lui dis que je voudrais bien la rencontrer un jour, quand ce sera possible.

Bon anniversaire, chère Jacqueline, et au plaisir de vous voir en vrai.

Laure Salamon

Sa fiche wikipedia est à lire là et pour lire mon article c’est par ici.

Et sinon je vous recommande la lecture de son ouvrage, elle ne parle pas de son enfance ni de son expérience scoute, mais son témoignage de résistante, déportée, survivante est passionnant.

Résistante, Jacqueline Fleury-Marié, avec Jérôme Cordelier, Calmann-Levy, 2019, 15,90€

Noëlla Rouget
résistante, déportée et opposante à la peine de mort

Noëlla Rouget
Noëlla Rouget
Noëlla Peaudeau, en uniforme de guide, 1934

Elle était libre, Noëlla. Libre de choisir ses combats, libre de les assumer jusqu’au bout.

Née à Saumur le 25 décembre 1919, elle est élevée dans la foi catholique. Elle s’engage en 1941 dans la Résistance car elle ne supporte pas la présence allemande à Angers.

Arrêtée avec son fiancé, lui est fusillé, elle est envoyée dans un camp de concentration.

Arrivée à Ravensbrück fin janvier 1944 dans le convoi des 27000, Noëlla y rencontre Geneviève de Gaulle, Germaine et Emilie Tillion, Anise Postel-Vinay… Fervente catholique, prier l’aide à tenir.

À sa libération en avril 1945, elle ne pèse plus que 32 kilos et va se reposer en Suisse. Elle fait la connaissance d’André Rouget. En 1947, ils se marient en 1947 et s’installent à Genève. Ils ont deux fils.

La grâce de son bourreau

Vingt ans après, celui qui l’avait arrêtée et envoyée en camp est retrouvé. Elle le défend pour lui éviter la peine de mort et l’obtient. Elle était vraiment opposée à la sentence maximale. Noëlla entame alors une correspondance avec lui, Vasseur. “Elle ne dit pas qu’elle lui a pardonné, raconte Brigitte Exchaquet-Monnier, co-auteure de sa biographie dans un article de Réforme. Elle disait que c’est difficile. Mais elle avait cette conviction qu’un homme a quelque chose de bon en lui. Elle a cru jusqu’au bout qu’elle pourrait le faire changer et qu’il prenne conscience de ses crimes. Mais elle n’a pas réussi.”

La vie de Brigitte croise celle de Noëlla Rouget grâce à mademoiselle Irène. Son ancienne nounou de 94 ans confie à Brigitte en janvier 2009 qu’elle s’est occupée des déportées revenues des camps. En remontant la piste, Brigitte et son mari Eric font la connaissance de Noëlla qui partage avec eux l’histoire de ce chalet. Une belle amitié naît. Le couple Monnier espère publier la biographie de Noëlla Rouget avant sa disparition. “Qui connaît ces femmes dont on ne parle jamais ?” interroge Brigitte Exchaquet-Monnier.

En parallèle de leurs recherches, les Monnier interpellent un journaliste du Monde qui publie en 2019 un article sur la grande dame.

La publication déclenche un tourbillon médiatique, Noëlla est sollicitée par beaucoup de médias, peu avant de souffler ses 100 ans. Au printemps 2020, elle survit à la covid-19, confinée dans sa maison de retraite à Genève. Sa biographie sort enfin chez Tallandier, après quelques déboires éditoriaux. Brigitte et Eric vont lui montrer à la maison de retraite. “C’était un moment plein d’émotion, raconte-t-elle. Elle nous a dit : je vais le lire, je vais apprendre des choses.” Elle avait beaucoup d’humour.

Son histoire restera

“Quand Noëlla Rouget disparaitra, le livre restera.” ai-je écrit en juillet à propos de sa biographie. Le 22 novembre 2020, Noëlla s’est éteinte, à Genève, dans sa 101ème année. J’ai reçu un mail de ses biographes qui m’ont gentiment prévenue. Je ne l’ai jamais rencontrée mais après avoir lu son histoire et interviewé ses amis, j’avais l’impression de la connaître, un peu. J’étais triste et en même temps soulagée pour elle. Elle a retrouvé beaucoup de monde là où elle est.

Peu de femmes ont la chance de pouvoir lire leur propre biographie. Dans l’ouvrage qui retrace sa vie, on comprend ses motivations à lutter contre la peine de mort, à entamer une correspondance avec son bourreau, on sait aussi pourquoi elle a si peu raconté à son retour de déportation et pourquoi elle s’est mise enfin à témoigner.

Laure Salamon

À lire : Noëlla Rouget, la déportée qui a fait gracier son bourreau, Brigitte Exchaquet-Monnier et Éric Monnier, Tallandier, 256p., 19,90 euros.

Pour lire sa fiche wikipedia, c’est par ici.

Et pour écouter l’émission Affaires sensibles diffusée le 23 octobre 2020 sur France Inter, c’est par là.

Denise Vernay
résistante et témoin de la déportation

Par Anonyme, no author disclosure — http://florentinejeansueur.webnode.fr/news/denise-vernay/, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=48199658
Denise Jacob en 1944

Denise Vernay, née Jacob, est entrée très jeune dans la Résistance française dans la région de Nice d’abord, puis à Lyon et en Haute-Savoie. Après avoir été arrêtée par la Gestapo pendant une mission qu’elle effectuait en tant qu’agente de liaison, elle est déportée au camp de Ravensbrück.

Durant les presque huit mois qu’ont duré sa déportation, Denise continuera de mener des actions de résistance, notamment en prenant régulièrement la place de camarades polonaises trop affaiblies par les « expérimentations médicales ».

L’ensemble de son parcours est marqué par son engagement dans le scoutisme.

C’est lors d’un camp de cheftaines éclaireuses qu’elle décide d’entrer en contact avec la Résistance, elle est ensuite hébergée et cachée à plusieurs reprises par des amies éclaireuses. Au camp de Ravensbrück elles sont plusieurs éclaireuses mais aussi scoutes de toutes obédiences à se retrouver. Certaines, dont Denise, resteront soudées après leurs libérations et mèneront différentes actions de témoignages et de sauvegarde pour la mémoire des déporté.e.s.

Photo de Marie Rameau 
« Denise Vernay », dans Marie Rameau, Des femmes en résistance: 1939-1945, Paris, Éditions Autrement, 2008 (ISBN 978-2-7467-1112-9), p. 57
Denise Vernay en 2005. Photo de Marie Rameau1

En travaillant sur son histoire de résistante, de déportée et de témoin, j’ai découvert des petits bouts de l’histoire de ces femmes résistantes. J’ai particulièrement été touchée par la lecture des actions de résistance qu’elles menaient dans les camps, alors que tout n’avait plus aucun sens pour elles.

Sa page wikipédia a été mise à jour, je vous laisse y découvrir le portrait de cette femme passionnante, qui est aussi une des grandes soeurs de Simone Veil.

Photo de Valéry Hache. AFP
Simone Veil et Denise Vernay en 2014 lors d’une commémoration à Nice.
Photo de Valéry Hache, AFP.

Margaux (Mpantr)

1 : « Denise Vernay », dans Marie Rameau, Des femmes en résistance: 1939-1945, Paris, Éditions Autrement, 2008 (ISBN 978-2-7467-1112-9), p. 57

Alice Daul-Gillig
Résistante et militante associative

Il semble temps de vous raconter un peu mes premières péripéties sur Wikipédia.

La première femme sur laquelle j’ai choisi de travailler dans le cadre du projet des Astrales est Alice Gillig, née Daul, ancienne cheftaine des guides et résistante française.

J’ai mis plusieurs mois avant de seulement commencer mon brouillon Wikipédia sur cette femme, je n’avais jamais écrit de biographie avant et j’ai donc passé un certain temps à récolter toutes les informations que j’avais sur elle.

Le jour où je me décide enfin à publier, je m’aperçois assez étonnée qu’il existe déjà une fiche sur elle… qui a été crée la veille !

Je dois avouer que de savoir que plusieurs mois de travail (certes pas à pleins temps) n’auront servi à peu de choses ont été difficile à avaler. Il s’avère, en fait, que nous étions trois personnes (en réalité deux + un groupe de travail en Alsace.) à travailler au même moment sur sa biographie.

Mais qu’importe après tout, sa fiche existe et son histoire sera maintenant accessible au plus grand nombre.

Je vous laisse consulter sa fiche ici.

Nicole Clarence
Résistante et photographe

Nicole Clarence en 1939 (Elles, la résistance – ML Coudert)

Venez découvrir Nicole Clarence, résistante durant la seconde guerre mondiale puis photographe ! Elle a maintenant sa page wikipédia qui a été mis en ligne il y a quelques semaines par nos bons soins !

Nicole Clarence découvre par l’intermédiaire de son frère les éclaireurs où elle devient cheftaine de louveteaux. C’est par ce biais là qu’elle fait ses premieres actions de résistances, principalement quelques surveillances de batiments côtiers au début.

Par la suite, elle rejoindra le mouvement Francs tireurs, ainsi que le réseau Buckmaster avant de finalement intégrer le M.U.R (Mouvements Unis de résistance).

C’est à Paris qu’elle est arrêtée et déportée pour fait de résistances. Elle s’évade en 1945 avec d’autres déportées au cours d’une marche de la mort.

Plus tard elle sera journaliste pour plusieurs journaux, comme Madame le figaro, Elle et travaillera aussi à l’agence Magnum.

Dja